Les divagations d’un Penseur solitaire.
Je me souviens de ce temps ou ceux qui avaient à charge mon éducation me demandaient « qu’est ce que tu veux « faire » plus tard quand tu seras grand ? » Cette question me prenait toujours au dépourvu et gêné je ne savais que répondre avec cependant au fond de moi-même la certitude que je n’allais pas rester sans rien faire. J’avoue que m’entendre répéter « fait ceci, fait cela » je n’avais pas pour « faire » un très grand attrait, ma seule ambition était de ne pas « faire » moins bien que ceux de ma caste comme dirait un intouchable. J’ai réalisé cet objectif, en ce temps, pour échapper au travail fallait courir vite, toujours rattrapé j’ai passé mon existence à « faire ».
Les bonnes questions provoquant toujours de bonnes réflexions, je me demande ce qu’aurait été mon existence si la question avait été « Qu’est ce que tu veux « être » plus tard quand tu seras grand ? » Ainsi posée cette question aurait peut être suscité en moi une autre façon de voir l’avenir. Aujourd’hui je répondrais sans hésiter « être moi-même » me convient.
A présent la vieillesse me contraint à cesser toute activité sauf celle de râler disent mes proches. Heureusement râler n’empêche pas de penser voilà au moins une activité accessible à tous, qui ne coûte rien et permet parfois de faire des découvertes philosophiques insoupçonnées. C’est ainsi que Descartes, non pas le joueur de belote mais le grand philosophe se surprenant à penser s’écria « si je pense c’est donc que je suis ! » Je trouve cette affirmation très rassurante. J’ai bien pensé moi aussi m’écrier « si je vieillis c’est donc que je suis vivant » mais j’en conviens cette exclamation a peu de chance de passer à la postérité. Le plus souvent lorsque je pense (avec ma tête) ce ne sont que des questions qui me viennent. Je me garde bien de les divulguer il se pourrait qu’il y en ait une qui n’aurait jamais été posée et certains mal pensants pourraient s’en accaparer, répondre de travers et qui sait ce qu’elle pourrait déclencher.
La vieillesse je l’accepte comme l’étape qui m’était absolument indispensable. Elle m’offre avant que ne soit trop tard ce temps de réflexion qui me permet de reconsidérer mes convictions. Trop accaparé par diverses activités, la création m’apparaissait autrefois banale, comme allant de soi, à présent je remarque étonné combien elle est extraordinaire, fantastique. Admiratif et reconnaissant je ne trouve rien de mieux que m’exclamer, chapeau et merci l’artiste ! Mais pourquoi est-il si discret ce génial créateur ?
Je me souviens de ce que ma religion m’a enseigné à son sujet. A présent (Dieu soit loué) débarrassé de la crainte et de la peur que m’inspirait cet impitoyable créateur c’est un tout autre rapport qui s’est établi entre lui et moi. Pour tout dire de l’intimité de notre relation c’est sans rendez vous et à ma convenance que je communique avec lui. Parler avec humour de nos problèmes est en quelque sorte une façon ludique et rassurante de prier en l’associant à nos malheurs.
Parfois j’ai même le culot de lui faire quelques remarques désobligeantes concernant l’indifférence qu’il manifeste à notre égard. Il m’écoute sans montrer le moindre agacement c’est vrai que Dieu en toute circonstance garde sa dignité. Il m’a simplement fait remarquer que son désintéressement n’est pas de l’ingratitude mais au contraire la marque du profond respect qu’il accorde à notre liberté. « Mes interventions ne feraient qu’aggraver vos conflits. » m’a-t-il soufflé « Si je me présentais même en faisant des prodiges ceux qui se réclament de mon autorité diraient : c’est surement le Diable si c’était lui le vrai Dieu il s’occuperait en premier de punir les mécréants, rétablirai l’ordre et nous débarrasserai de la racaille. D’autres les extrémistes de tout bord pour discréditer me feraient porter le chapeau de leurs pires atrocités.
Par délicatesse je n’ai pas voulu lui parler de la crise mondiale qui nous frappe, il aurait été peiné pour me répondre que nous avons trouvé ce que nous avons bien cherché. Par respect je n’ai pas osé lui demander ce qu’il convient à présent de faire pour en sortir …
Pour éviter de répéter les mêmes erreurs qui nous ont conduits ou nous en sommes le temps est venu pour notre gouvernance de faire appel à notre bon sens. Pourquoi ne pas se référer à cette bonne vieille Sagesse que nous proposaient déjà les philosophes de l’antiquité. Ils nous invitent à chercher en nous même ce complément de connaissance qui nous permet de mieux discerner ce qui nous est utile de cela qui nous dessert. Naturellement attirés par le bon, le vrai, le beau, l’abondance et la diversité de la création nous incitent à œuvrer vers cet objectif.
Mais bon sang ! Pourquoi ce savoir ne nous est il pas enseigné prioritairement ?